Le projet LPP21 abordé par le Conseil national en décembre reprenait point par point le « compromis des partenaires sociaux » élaboré en 2019. Une baisse brutale et massive du taux de conversion (de 6,8% à 6 d’un seul coup), entraînant une baisse des rentes d’environ 12%. Baisse partiellement compensée par une forte augmentation de la capitalisation (cotiser beaucoup plus pour simplement maintenir le niveau de sa rente) et par l’introduction d’un supplément de rente financé solidairement (un peu comme dans l’AVS, les revenus élevés cotisent davantage).
Mais la droite s’est montrée très arrogante et a méthodiquement détricoté un compromis déjà totalement inacceptable. Le supplément de rente financé solidairement a été balayé. La droite ne veut pas d’une mini-AVS dans le 2e pilier. Elle le remplace par un supplément médiocre basé sur le principe de l’imputation. Ne pourront en bénéficier que les personnes dont le niveau de rentes ne dépasse pas le minimum LPP, ou ne le dépasse que de très peu. Cela ne concernera qu’une minorité.
Le conseil national a voté deux autres mesures provoquant un renforcement de la capitalisation. Il augmente la partie du salaire obligatoirement assurée et abaisse le seuil d’accès au 2e pilier à 12’548 francs (au lieu de 21’330). La Verte Léonore Porchet applaudit en signalant « qu’il est primordial de permettre aux femmes et aux travailleuses à temps partiel de profiter du 2e pilier ». Elle ne perçoit pas que la capitalisation ne profite qu’aux revenus supérieurs. La droite met encore une couche anti-jeune en faisant débuter l’obligation de cotiser à 20 ans (25 actuellement) et en augmentant la cotisation de 7 à 9% jusqu’à 35 ans.
Le compromis que l’Union syndicale suisse avait élaboré avec l’Union patronale est flingué, il n’en reste pratiquement plus que la baisse massive du taux de conversion. Pierre-Yves Maillard est dépité : »Le mépris pour l’Union patronale suisse est total – je suis choqué de voir la manière dont cette organisation est traitée par les partis de droite ». Au nom du groupe socialiste, Barbara Gysi réagit :« Nous ne soutenons la baisse du taux de conversion à 6% que dans le cadre du compromis des partenaires sociaux. Mais la situation a changé. C’est pourquoi nous soutiendrons la proposition de la collègue Prezioso et plaiderons pour 6,4% ». La proposition d’EàG de coupler une baisse modérée du taux de conversion à l’introduction d’un supplément de rente financé solidairement a été rejeté par 126 voix contre 61, dans le cadre d’un classique vote gauche-droite.
Il y aura donc probablement, comme contre AVS21, un référendum largement soutenu par la gauche et les syndicats contre LPP21. On voit mal en effet comment le Conseil des Etats pourrait l’année prochaine remettre en selle le compromis dit des partenaires-sociaux. C’est bien ce qui désole Alain Berset, qui prévient que sans réforme convenable du 2e pilier, « il sera encore plus difficile de réunir une majorité pour la réforme du 1er pilier ».
Les choses sont désormais relativement claires : le préalable à une réforme des retraites favorable à la majorité de la population, c’est la chute d’AVS21 et de LPP21 en votation populaire. Nous devons coupler notre refus à AVS21 et à la LPP21 avec la seule option possible, juste, solidaire et écologique : l’intégration du 2e pilier à l’AVS. Nous déposerons une initiative parlementaire à ce sujet lors de la session de mars 2022.