Ensemble à Gauche avait déposé le projet de loi 12521, Pour une police au service de la population, il y a trois ans et demi, en réponse à une profonde crise au sein de la police. Celle-ci avait été révélée notamment par un sondage de la commission du personnel et par une étude de l’université de Genève. Elle résultait en bonne partie de problèmes structurels suscités par la nouvelle LPOL, entrée en vigueur en 2016, il y a 6 ans. Ce projet de loi a été adopté par une écrasante majorité du Grand Conseil, le 3 novembre dernier, malgré une campagne effrénée du Conseiller d’État Mauro Poggia et de la direction de la police pour s’y opposer.

Que demande cette loi désormais adoptée par le parlement ?

  • Une police citoyenne, proche de la population, qui la protège, quand elle fait appel à elle, en particulier les plus fragiles d’entre nous.
  • Une police au service du public, tout comme le corps enseignant, le travail social, l’hôpital, avec lesquels elle est appelée à collaborer.
  • Une police formée dans une école proche du terrain genevois et de ses spécificités, dont les aspirants restent intégrés dans leur cadre de vie, dans leur famille, dans leur quartier.
  • Une police qui reconnaisse la différence du métier de gendarme et d’inspecteur de la PJ et permette aux aspirants de choisir entre ces deux filières.
  • Une police dont la formation soit décidée par le canton dans lequel elle opère et non au gré d’accords inter-cantonaux qui échappent à tout contrôle démocratique.
  • Une police régie par une loi votée par la majorité de ce parlement et soumise au référendum facultatif, que l’expérience rende perfectible au fil du temps.

Que rejette-t-elle au contraire ?

  • Une police qui confie ses différentes missions à des silos cloisonnés, privant ses membres d’une expérience diversifiée et d’un contact varié avec la population.
  • Une police qui ressemble à une armée mexicaine, avec une pléthore de gradés.
  • Une police formatée en caserne, dirigée par des cadres souvent issus de l’armée et dont l’évaluation a même été récemment confiée au rédacteur en chef de la Revue Militaire Suisse.

À l’avenir, nous souhaitons vivement :

  • que le magistrat responsable de la sécurité écoute les problèmes que lui remontent la population, de même que le personnel de terrain et ses organisations syndicales ;
  • qu’il agisse face à la crise profonde d’un service dont il a la responsabilité plutôt que de jouer la montre et de se cantonner à l’inertie ;
  • qu’il respecte la séparation des pouvoirs et ne menace pas, comme il l’a fait, une commission de notre parlement de suspendre ses travaux si elle adopte un PL qui ne lui convient pas.  
  • qu’il s’empresse de faire appliquer la loi adoptée par le parlement après sa promulgation, au terme du délai référendaire, le 21 décembre prochain, et donne des consignes claires dans ce sens à l’État-Major de la police.

La loi qu’Ensemble à Gauche a fait adopter donne enfin une chance de sortir d’une crise qui dure depuis beaucoup trop longtemps. Elle fait un pas en direction d’une police citoyenne. Pour autant, la lutte est loin d’être terminée contre les dérives militaristes et répressives, auxquelles aspirent trop souvent sa hiérarchie et le chef de son département de tutelle.

Jean Batou