Le parlement genevois a voté pendant les années avant la révolution tunisienne de 2011, nombre d’objets concernant la situation préoccupante en Tunisie au regard des droits de l’homme au sens large. Face aux évènements en Tunisie c’est avec cette tradition que nous avons renoué, par une proposition de résolution dont la première signataire est Salika Wenger.

Sous la dictature de Ben Ali notre camarade, l’ancien Conseiller d’État, puis député sur les bancs de l’Alliance de Gauche (ADG), Mr Christian Grobet a, en particulier, multiplié de très nombreux voyages en Tunisie pour assister comme observateur, malgré toutes les entraves mises par le pouvoir, à nombre de procès politiques comme avocat et comme défenseur des droits de l’homme.

Notre ancienne collègue, alors vice-présidente ADG du Grand Conseil, Anita Cuenod, d’ascendance tunisienne, a participé également à l’observation critique de plusieurs procès pour la Ligue suisse des droits de l’homme.

Au moment de la chute de la dictature de Ben Ali, nous avons donc pu – à Genève – être fiers d’avoir très modestement contribué à celle-ci, en défendant avec assiduité les droits humains en Tunisie, comme les aspirations du peuple tunisien à une vie meilleure, en accueillant aussi de nombreux opposant·e·s tunisiens exilé·e·s, en donnant une tribune à leur message et en faisant entendre leur voix, en les aidant aussi matériellement…Nombre d’organisations non gouvernementales basées à Genève ont, elles aussi, aidé à porter le fardeau de la défense des droits humains en Tunisie…

Le CSM tunisien dissout… la goutte d’eau qui fait déborder le vase.

C’est pourquoi quand ce 8 février 2022 tant le Haut-commissariat aux droits de l’homme de l’ONU sis à Genève, qu’Amnesty International ont dénoncé de concert le dernier acte arbitraire et autoritaire du nouvel apprenti-dictateur tunisien qui a dissout le Conseil supérieur de la magistrature de son pays pour consolider son emprise sur celui-ci, c’était la goutte qui a fait déborder le vase et nous avons estimé que de ne pas réagir au plan parlementaire serait faillir à nos devoirs et trahir un héritage honorable.

EAG a donc déposé une proposition de résolution concernant la situation en Tunisie qui devrait être inscrite à l’ordre du jour de notre prochaine session. En votant cette résolution le Grand Conseil genevois:

  • déclarera sa solidarité avec tous ceux et toutes celles qui luttent en Tunisie, aujourd’hui comme hier, pour le rétablissement et le renforcement d’institutions réellement démocratiques, respectueuses de l’ensemble des droits humains des femmes et des hommes de ce pays:
  • condamnera les violations crasses de l’ordre constitutionnel et de l’état de droit par le pouvoir autoritaire du président actuel, auteur d’un véritable coup d’État rampant,
  • réprouvera la répression et les brutalités dont sont victime aujourd’hui de nombreux·euses opposant·e·s, à l’exemple de l’ancien président Marzouki, condamné sur à 4 ans de prison pour «atteinte à la sécurité extérieure de l’État».
  • appellera au respect en Tunisie de la liberté de la presse et des médias, comme de la liberté d’expression en ligne, y compris pour les blogueurs, et hors ligne ainsi que la liberté de réunion…
  • soulignera la nécessité d’un large dialogue social avec la participation d’organisations de la société civile — pour surmonter la crise politique et constitutionnelle; en relevant à ce titre le rôle incontournable de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT)
  • demandera au Conseil d’État de relayer la préoccupation manifestée par cette résolution en direction des médias, de l’opinion publique internationale et des autorités fédérales pour qu’elles interviennent dans le même sens.

Salika WENGER