Le Grand Conseil fait la sourde oreille aux difficultés des couples séparés et au processus d’appauvrissement qu’induit trop souvent une séparation ou un divorce. Il a refusé un projet de loi que nous avions déposé début 2017 pour accélérer l’entrée en matière du service d’avances et de recouvrement des pensions alimentaires (SCARPA) et surtout pour mettre fin à la limitation de la durée des avances et éviter l’aberration qui conduit ce même SCARPA à se rembourser prioritairement ses avances, quitte à devoir en prolonger la durée ou à laisser un.e débiteur.trice alimentaire sans pension. Il ne s’agit pas pour les auteur·e·s de ce projet de loi de tabler sur une durée illimitée, mais de demander à ce que les avances durent tant que les pensions ne sont pas récupérées.

Selon une estimation de Caritas Suisse, plus d’un débiteur sur cinq ne verse pas, ou alors qen partie seulement ou avec retard les contributions d’entretien dues à ses enfants. Une observation qui confirme la nécessité de veiller à ce que les contributions soient réellement versées, ou qu’elles soient au moins partiellement compensées dans l’attente de leur recouvrement par voie de poursuites ou par d’autres procédures.

De fait, le projet de loi 12068 propose quatre modifications qui ont pour but d’éviter la paupérisation des ménages concernés par le non-paiement de ce que l’on appelait il y a peu encore des pensions alimentaires et qui apparaissent désormais sous le vocable de contributions d’entretien. Déposé en février 2017, il a été examiné dès mars 2017. Une célérité louable, mais rapidement tempérée par 4 gels successifs, tous subordonnés à l’avancement de la révision du droit fédéral en matière de contributions d’entretien et de l’ordonnance y relative. Les travaux de la commission sur ce projet de loi ont finalement abouti à un vote négatif en juin 2020. A noter toutefois, que dans l’intervalle, au moins deux de ses propositions ont été introduites au niveau fédéral.

La commission des affaires sociales n’a pas voulu de ce projet de loi au motif qu’il aurait coûté trop cher. Ce type de raisonnement, qui nous est systématiquement opposé, relève d’une vision à court terme. Le Conseil national ne s’y est pas trompé, lui qui a adopté deux des propositions de ce PL.

Restaient donc non traitées par la révision fédérale les questions de la durée des avances et celle de l’affectation prioritaire des pensions recouvrées. Le canton de Genève aurait pu corriger cette situation. Il lui suffisait pour la durée des avances de revenir à sa pratique en vigueur avant 2007. Pour l’affectation des sommes récupérées, il lui appartenait de déterminer une procédure qui privilégie l’autonomie de l’ayant droit.  Il ne l’a pas voulu. La majorité du Grand Conseil a encore invoqué le piètre argument d’un risque de déresponsabilisation des couples concernés qui se reposeraient abusivement sur les avances de l’État. Un faux prétexte évident, si l’on tient compte du fait que les procédures de recouvrement ouvertes systématiquement en parallèle à celles d’avances contredisent non seulement ce soupçon, mais qui plus est garantissent de rendre à terme les avances non nécessaires.

Au final le Grand Conseil, une fois de plus, n’a pas voulu prendre des mesures pour d’éviter la pauvreté et la précarisation d’un nombre conséquent de ménages concernés par le problématique du non paiements de pensions alimentaires. En fait, régulièrement la majorité du parlement lève les bras au ciel en s’alarmant de l’augmentation de la pauvreté, mais elle feint toujours d’ignorer qu’il ne s’agit pas d’une fatalité, mais d’un choix politique.