Les électeurs-trices du Canton de Genève auront à se prononcer sous peu sur une modification constitutionnelle. EàG a poussé à la roue de celle-ci et a déposé plusieurs projets de loi en la matière. Il s’agit ici de la possibilité de destituer un (ou des) conseillers·ères d’État ayant très largement perdu la confiance de la population suite à des actes particulièrement graves illégaux ou scandaleux.

La loi adoptée à l’unanimité ou presque par le Grand Conseil (PL 12827-A ) début juillet prévoit que 40 député·e·s puissent déposer une résolution de destitution, qui doit être votée dans une prochaine séance du parlement par une majorité qualifiée de 75% des élu·e·s pour être ensuite soumise au vote populaire dans les meilleurs délais. Si le peuple approuve la destitution dudit/de ladite magistrat·e, celui-ci/celle-ci quitte immédiatement sa charge pour être remplacé lors d’une élection complémentaire organisée, elle aussi, dans les meilleurs délais.

Cela empêche un magistrat discrédité de s’accrocher abusivement à son poste pendant des mois voire des années, ou de toucher un salaire à ne rien faire ou presque, a contrario cela permettra aux citoyen·ne·s de rétablir pleinement un magistrat dans ses fonctions, si une majorité populaire désavoue le Grand Conseil en la matière et refuse la destitution proposée par le parlement.

Il s’agit donc d’une extension significative des droits populaires, le peuple – ou du moins les électeurs·trices – peut aujourd’hui élire les conseillers·ères d’État, désormais, si ce projet de loo constitutionnel est adopté dans les urnes, il aura la faculté de voter également pour les démettre et les réélire.

Ce n’est qu’un début…
Mais cette réforme démocratique, aussi significative qu’elle soit, ne représente qu’un début. En effet, elle répond aux situations du type du «cas Maudet» ou une large unanimité se fait pour estimer qu’il faut destituer tel ou tel conseiller·ère d’Etat et où une majorité des trois-quarts du parlement est envisageable dans ce sens.

Mais encore faut-il précisément que le parlement se prête au jeu. Il a en effet avec ce mécanisme – seul – l’initiative du processus. Or une des caractéristiques de notre démocratie semi-directe, c’est qu’un comité d’initiative, ou d’ailleurs un comité référendaire, peuvent proposer ou s’opposer à une loi, sans aucun soutien parlementaire a priori.

Ainsi, parmi les PL, en suspens et qui seront prochainement traités par la commission des droits politiques du Grand Conseil, il y a un projet de loi d’Ensemble à Gauche, le PL 12421, qui institue une initiative révocatoire, qui pourra être lancée par un comité d’initiative citoyen, qui, en récoltant de l’ordre de 10 000 signatures (4% du corps électoral) pourra faire soumettre au suffrages du souverain la révocation pure et simple du gouvernement cantonal – dans son ensemble.

Ce mécanisme complétera la disposition constitutionnelle que le Grand Conseil vient de voter unanimement. Gageons que l’unanimité ne sera pas forcément au rendez-vous de cette proposition plus radicale : mais on ne voit pas bien au nom de quels principes des démocrates conséquents pourraient s’opposer à ce que les électeurs·trices puissent par un tel mécanisme « retirer leur confiance » au gouvernement et susciter de nouvelles élections au Conseil d’État.

Relevons d‘ailleurs au passage que les cantons de Berne, Thurgovie, Schaffhouse, comme ceux du Tessin et d’Uri…  connaissent déjà ce principe et que – en la matière – Genève, en adoptant cette proposition, ne ferait donc pas figure de canton précurseur. La Constituante avait d’ailleurs évoqué ces problématiques, sans avoir le courage d’adopter une telle disposition. Affaire à suivre donc…

Pierre Vanek