Malgré la crise historique que nous vivons, les comptes 2020 affichent une très forte hausse des revenus de l’impôt sur les personnes physiques (+ 418 millions), nettement supérieure à celle prévue au budget 2020. Cette hausse provient notamment de l’impôt sur les successions en ligne indirecte et des impôts immobiliers, qui concernent avant tout les grandes fortunes. Le déficit de près de 600 millions qui avait été annoncé au budget était donc très largement surestimé. Sans l’effet de la pandémie, les comptes seraient en fait proches de l’équilibre. Compte tenu de la situation actuelle, le déficit de 498 millions est donc relativement réduit.

Ces chiffres révèlent une fois de plus que l’Etat aurait les moyens de mener une politique beaucoup plus ambitieuse sur le front social mais aussi environnemental. Par ailleurs, il est urgent de s’attaquer frontalement à l’explosion des inégalités sociales. Les revenus de l’imposition sur les personnes physiques démontrent en effet que les grosses fortunes se portent de mieux en mieux, même en période de crise. « L’enfer fiscal genevois pour les millionnaires » est donc un mythe. Ce sont les couches populaires qui souffrent de la crise, alors que le gouvernement ne cesse de bichonner les entreprises les plus bénéficiaires et les personnes physiques les plus riches.

Le coût de la baisse massive de l’imposition des bénéfices des entreprises (RFFA) a été sous-estimé, puisqu’il est évalué aujourd’hui à 129 millions pour 2020 au lieu des 105 millions annoncés au moment du vote du budget. Cette détérioration est d’autant plus inquiétante que la crise aurait dû réduire le manque à gagner de la RFFA en raison des bénéfices en berne de nombreux secteurs. Cela montre que les secteurs les plus touchés sont précisément ceux qui déclaraient déjà peu ou pas de bénéfices.

Rappelons que le coût de l’imputation partielle de l’impôt sur le bénéfice à l’impôt sur le capital pour 2021 sera deux fois supérieur à celui annoncé par les partisans de la RFFA (147.1 millions au lieu de 71.3 millions). Cela laisse donc augurer un impact fiscal futur largement supérieur aux prévisions de la droite et du Conseil d’État, comme EàG n’a cessé de le dénoncer. Il y a donc là une marge de manœuvre pour le canton, puisque la baisse de l’impôt sur les bénéfices ne profite qu’aux entreprises qui se portent au mieux. Nous proposons pour cela de suspendre la montée en puissance de la RFFA, qui ne déploie encore qu’une partie de ses effets négatifs en termes de manque à gagner pour l’État et les communes, ceci afin de venir en aide aux travailleur-euses, aux petit-e-s indépendant-e-s et aux microentreprises qui souffrent le plus durement de la crise.

Enfin, le faible taux de réalisation des investissements (73%), devenu récurrent depuis plusieurs années, est particulièrement inquiétant. En effet, les besoins sociaux et environnementaux en matière de mobilité douce, de création d’emplois, d’aménagement du territoire, de construction et d’entretien des bâtiments publics, d’économies d’énergie, etc. sont plus urgents que jamais.